En juin 2021, le NADOT, séminaire des directions des Organismes de Gestion des Destinations de Nouvelle-Aquitaine a pris une nouvelle forme en se déclinant aux 4 coins de la région. L’occasion de prendre le temps de lever la tête du guidon pour échanger avec ses pairs sur une thématique centrale “Les Organismes de Gestion des Destinations, acteurs de leur propre changement”.
En effet, les derniers mois ont été synonymes de questionnements profonds voire de changement dans les relations entre les ODG et les prestataires, les collègues ou encore les élu.e.s. Ce dernier point était justement le sujet qui a motivé nos directeurs lors d’une séquence à Bergerac. Découvrez ci-dessous le fruit de leurs réflexions et les diverses préconisations qui ont été faites pour créer une relation de confiance avec son élu.e.
Elu.e et directeur.ice : le duo du développement local
Ce titre vous dit quelque chose ? Normal, il fait écho à la série de webséminaires qui ont eu lieu en 2020, suite aux nouvelles élections et dédiée au trio du développement local : élu.e technicien.ne de la collectivité et directeur.rice d’office de tourisme. L’objectif : cerner les bonnes conditions de collaboration pour allier projets politiques, développement du territoire et stratégie de moyens.
En effet, collectivité et office de tourisme sont indissociables quand on parle de développement local et il en est de même pour le binôme élu.e et directeur.ice d’office de tourisme. Une relation pas toujours évidente puisqu’elle est mouvante avec les différentes mandatures et cela nécessite donc un travail d’adaptation constant. Pourtant ce binôme est la clé pour pouvoir mener des projets territoriaux. Pour cela, il faut non seulement que la relation soit bonne mais aussi que l’on partage la même vision et les mêmes méthodes de travail. En bref : une vraie relation à construire et à entretenir pour pouvoir piloter correctement sa stratégie.
Plusieurs témoignages ont été apportés durant la journée faisant état de différentes situations rencontrées par les binômes direction-élu.e. On retrouve des binômes historiques où la relation est acquise et sereine même si parfois l’élu.e souhaite plus ou moins de contrôle sur les projets de l’office de tourisme. On a également des relations plus récentes qui nécessitent encore un peu de temps pour bien se mettre en place, et qui peuvent parfois donner lieu à une belle alchimie. Quant au dernier scénario, il se caractérise par une dégradation, parfois subite, pouvant mener jusqu’à une relation toxique ou bien souvent le.a directeur.ice ne trouve plus/pas sa place.
Comment faire pour éviter cette situation et construire une relation durable ? C’est la réflexion qu’a mené le groupe de travail lors de cette journée et plusieurs questionnements en sont ressortis :
- Comment faire pour construire un projet commun / une vision / un plan d’attaque commun avec mon élu.e ?
- Comment faire pour que la relation soit réciproque ?
- Comment faire pour que l’élu se sente solide, en confiance sur son sujet ?
- Comment faire pour avancer même si on n’est pas d’accord ?
- Comment faire pour parler le même langage ?
- Comment faire pour restaurer une relation qualitative quand cette dernière est partie « en cacahuète » ?
- Comment faire pour l’intéresser ?
- Comment faire pour être certain du périmètre de décision de son élu.e ?
- Comment faire pour créer des moments privilégiés ?
- Comment faire pour favoriser l’expression des besoins ?
- Comment faire pour atteindre un.e élu.e indisponible ou inaccessible ?
- Comment faire pour entretenir la flamme ?
- Comment faire pour adapter la relation à la situation de façon durable ?
Analyser sa position via la matrice
Pour pouvoir répondre à ces questionnements, la première étape consiste à analyser sa position par rapport à son élu.e et adopter une attitude adéquate. Il faut avant tout identifier la relation avec son élu.e. Pour cela, le groupe de travail a proposé une matrice qui permet de juger de sa relation en fonction de deux indicateurs :
- En ordonnée : le degré de communication entre vous et votre élu.e. Est-il facile ou bien difficile ?
- En abscisse : le contrôle exercé par votre élu.e sur vos actions quotidiennes, Est-il accentué ou bien plutôt libre ?
Ainsi différents profils se dressent :
- La défiance, une relation compliquée où l’élu.e souhaite avoir un maximum de contrôle et la communication est compliquée ;
- La confiance mesurée, où la communication est plus facile et régulière mais pour autant le contrôle reste de mise de l’élu.e ;
- L’indifférence, où l’élu laisse le contrôle au directeur et la communication est compliquée car l’élu.e est généralement difficile à mobiliser ;
- La complicité, où la communication est facile et la notion de confiance vis-à-vis du directeur est à son apogée car une véritable relation de confiance est établie entre les deux.
Le TOP 10 des recommandations des directeurs de Nouvelle-Aquitaine
Une fois la relation identifiée avec son élue.e, il est possible de mettre en place plusieurs actions pour faciliter la communication, la compréhension et ainsi la confiance mutuelle de votre duo. Voici quelques recommandations issues du groupe de travail :
1. Clarifier l’écosystème de référence de son élu.e
En amont d’embarquer son élu.e dans n’importe quelle réunion ou projet, l’étape essentielle est de faire connaissance avec son interlocuteur afin de clarifier son écosystème de référence et d’adopter les bonnes habitudes de travail.
Pour cela, vous pouvez établir une liste de questionnements essentiels à la bonne réalisation de tout projet : Comment préférez-vous que l’on communique ? Quelle est la nature des décisions que l’on peut prendre chacun individuellement et celles que l’on décide communément (périmètre de décision) ? Au sein de la collectivité, quelles sont les autres personnes clés dont les périmètres de décision peuvent impacter le développement du tourisme localement ?
Le conseil des directeurs : préparez une checklist des éléments à voir et à convenir impérativement ensemble. Ainsi, à chaque nouvelle mandature, il n’y a plus qu’à sortir la checklist !
2. Faire réellement connaissance
Et oui, cela peut paraître évident et pourtant qui peut affirmer bien connaître son élu.e ? Il ne s’agit pas de découvrir ses moindres hobbies/passions mais de provoquer un moment convivial pour en apprendre davantage sur son fonctionnement et sa personnalité. C’est-à-dire, exprimer ses besoins mutuels, ses attentes par rapport aux différentes missions, sa vision, ses envies et projets. Cette connaissance est à double sens et qui sait, elle donnera peut-être même lieu à une certaine complicité.
Le conseil des directeurs : embarquez votre élu.e loin du bureau pour des rendez-vous de travail. Allez sur le terrain, chez l’un de vos partenaires, au restaurant, lors d’une manifestation, etc.
3. Miser sur la régularité des rendez-vous
Un seul rendez-vous avec son élu pour acter des grandes décisions n’est pas suffisant. Afin d’en faire un véritable acteur de votre écosystème local, il va falloir ritualiser des moments. Pour cela, rien de plus simple que de définir des créneaux dans vos agendas sans pour autant les rendre systématiquement obligatoires. C’est un bon moyen d’avoir des nouvelles, engager la discussion et pourquoi pas continuer à faire connaissance et ainsi partager vos ambitions pour le territoire.
Le conseil des directeurs : partagez vos agendas et ritualisez ensemble des moments en alternant téléphone, rendez-vous en visio ou en présentiel.
4. Intégrer des tiers à vos échanges
Dans le cas d’une relation en « indifférence » il peut-être difficile d’avoir l’écoute de son élu.e. A ce moment là, il peut être opportun d’intégrer des tiers de confiance qui peuvent jouer le rôle d’observateur voir même de lobbying en votre faveur.
Le conseil des directeurs : créez un groupe dédié (WhatsApp, Signal…), avec votre élu.e et des tiers observateurs ainsi vous encouragerez les échanges et l’effet « groupe » peut vous permettre d’obtenir plus facilement une réponse.
5. Intégrer votre élu.e dans l’équipe
Pas toujours évident pour un élu.e, surtout s’il ne vient pas de votre univers, de connaître toute votre équipe, votre fonctionnement, votre organisation quotidienne. Pensez donc à mieux lui faire connaître votre équipe et vos métiers en l’intégrant aux grands moments de vie quotidienne de l’équipe (bilan de saison, grande réunion, etc.) ou comme à l’Office de Tourisme Destination Agen en l’intégrant au renouvellement de la photographie d’équipe au même titre qu’un membre : avec l’uniforme, le code couleur, etc.
Le conseil des directeurs : optez pour une journée « vis ma vie » et immergez-le dans le quotidien d’un office de tourisme de l’accueil, en passant par la commercialisation, l’accompagnement des prestataires, etc.
6. Développer sa connaissance du secteur touristique
Ce n’est pas non plus toujours évident de connaître le secteur touristique, les acteurs qui le compose, le territoire et ses spécificités, etc. Partagez votre expertise avec votre élu.e en lui proposant des éductours, envoyez-lui des ressources (articles de veille, articles de fond), etc. Cela vous permettra sans doute de mieux vous comprendre, de parler « le même langage ».
Le conseil des directeurs : partagez à votre élu.e les tendances touristiques ou suggérez-lui des newsletters lui permettant de se tenir au courant de l’évolution du secteur et de son éco-système, de l’évolution des métiers, de l’évolution des comportements/aspirations des clientèles… le tout avec si possible des exemples d’initiatives mises en place ailleurs, sur d’autres territoires.
7. Prendre en considération ses valeurs
Votre élu.e est humain comme vous, il a des valeurs qui font sens pour lui. Comme vous le feriez avec l’un.e de vos collègues, éviter de rentrer en conflit mais prenez en compte ce qui fait sens chez lui pour adapter votre argumentaire.
Le conseil des directeurs : amusez-vous avec les chapeaux de Bono qui est un très bon outil pour développer son argumentaire en fonction de différents profils/réactions auxquelles nous pouvons avoir à faire face.
8. Appuyez-vous sur les VRP de votre structure
Lorsque vous défendez un projet, appuyez-vous sur les VRP de l’office de tourisme qui peuvent être des habitants, des prestataires, des commerçants, d’autres élus, etc. L’objectif : montrer que votre projet emporte de l’adhésion pour pouvoir convaincre plus facilement.
Le conseil des directeurs : impliquez vos partenaires dans vos projets cela les valorisera et fera d’eux des ambassadeurs de votre structure.
9. Faire un reporting de ses actions
Indissociable de la mesure précédente, l’idée est de faire parler de son office, de ses actions en se prenant en photo lorsqu’on va sur le terrain, en utilisant les réseaux sociaux, etc. Ne pas être trop modeste et ne pas hésiter à faire son auto-promotion pour expliquer son rôle, ses actions. Ne pas hésitez non plus à valoriser les acteurs, les citoyens oeuvrant dans la cause du développement local, du développement touristique du territoire. La mission de « coordination des acteurs » a davantage de poids lorsque ce sont ces gens qui en parlent et qui parlent du rôle qu’occupe l’office sur le terrain. Cette communication permettra à votre élu.e de mieux comprendre votre utilité au quotidien. Ce qui pourra venir alimenter, consolider les échanges avec votre élu.e et ses homologues, lors de vos CA, AG, CODIR, Conseil d’exploitation… et ainsi semer de belles graines plaidant pour la cause du développement local, du développement touristique, et de fait de l’importance de soutenir l’activité de l’office.
Le conseil des directeurs : utilisez les différents médias à votre disposition pour communiquer régulièrement sur vos actions et partagez votre quotidien. Ne surtout pas se satisfaire d’un « simple » bilan annuel.
10. Evaluer
Jamais une action sans … évaluation ! Remettez en question les différentes actions précédentes, le périmètre d’intervention, la manière de communiquer, etc. Tout ceci permet d’adopter des actions correctrices et de s’assurer que la relation s’inscrive dans la durée de manière pérenne et durable.
Le conseil des directeurs : mettez en place un tableau de bord de vos projets avec indicateurs convenus dès le début. Ce tableau de bord, acté avec votre élu.e, sera votre fil rouge de discussion, d’analyse et de suivi des avancées des projets de votre structure.
> Instants #NADOT21 - Les OGD acteurs de leur propre changement
Retrouvez les autres articles rédigés dans le cadre des rencontres Instants #NADOT21.
Consultez les autres articles
A retrouver :
En 2009, la boîte à outils « Metteur en scène de territoire » a vu le jour. et a permis de travailler les outils de communication de l’office de tourisme avec ses élus.
Les contributeurs
Nous tenons à adresser un REMERCIEMENT CHALEUREUX aux collègues venus assister et contribuer à cette magnifique journée réseau qui s’est tenue à Bergerac le 3 juin 2021 : Pascal DUPOUY (directeur OT Bergerac) pour son très bel accueil au Quai Cyrano, Emilie LOUBRIAT (directrice OT du Pays de Fénelon en Périgord Noir) , Aïno REPCI (directrice OT Destination Agen), Christine RIBIERE (directrice OT Margaux Médoc Tourisme), Joël RIVIER (directeur OT Pays de Lauzun), Bouahlem REKKAS (directeur OT Sarlalt Périgord Noir), sans oublier notre invité à distance Christophe GAVET (directeur OT Sud Vendée Littoral), Lucia TEXIER & Chloé BONHOURE (stagiaires MONA) ainsi que Sophie DUPRAT-CAOURE et Fabien RAIMBAUD (animateurs MONA de cette journée).