Développer les mobilités douces

Alors comment le tourisme peut-il être durable ? Cette question, sous plusieurs formes a nourri les débats du séminaire des directeurs de la Nouvelle-Aquitaine de cette année – #NADOT19 -. Cet article revient sur un sujet en particulier. Le développement des mobilités douces.

« Vous pouvez secouer le monde d’une manière douce » – Mahatma GANDHI

Voyager, c’est polluer un peu

La « mobilité douce » constitue toute forme de déplacement non motorisé. On pense naturellement à la marche à pied, aux déplacements à vélo, en rollers, en trottinettes, etc… De nombreux termes similaires sont utilisés  : circulations douces, modes doux, déplacements doux, modes actifs, mobilité active… Tout ceci est englobé dans la notion d’éco-mobilité qui concerne l’ensemble des modes de transport jugés plus propres, sûrs et sobres que l’automobile individuelle ou l’avion  : train, bus, taxis, véhicules partagés…

Ok ! Mais que vient faire un office de tourisme ici ? Comment une structure comme un office de tourisme peut jouer un rôle dans cette histoire ?

Mettre en place des guides qui recensent les pistes cyclables, travailler sur la labellisation des hébergements touristiques, lancer des opérations ponctuelles de communication sur le durable, avoir une meilleure gestion des stocks, trier les déchets dans sa structure, limiter les impressions, vider le serveur informatique régulièrement, sensibiliser les visiteurs… tout ceci sont autant de bonnes initiatives. Mais est-ce suffisant aujourd’hui ? En effet, la question de l’éco-mobilité propose une véritable rupture avec le quotidien.

Mieux se déplacer suppose aujourd’hui de lutter contre ses habitudes et son confort au quotidien. L’éco-mobilité c’est avant tout un autre rapport au temps, un autre rapport à l’espace et un autre rapport à l’Homme.

Prendre du temps pour les vacances

Durant ses vacances, le vacancier désire prendre son temps ! Des touristes (certains touristes évidemment) prennent cela au pied de la lettre et décident de partir sans véhicule. Ils ne se déplacent plus comme avant. Les mentalités changeantes, les modes de consommation touristiques évoluent avec elles. Pour ces touristes là, engagés ou simplement soucieux de renouer avec la liberté de prendre du temps et de ne pas subir le stress de la voiture, partir est dorénavant compliqué. Si vos destinations peuvent permettre les déplacements durant le séjour, permettent-elles de faire les fameux derniers kilomètres entre la gare et l’hébergement par exemple ?

Nous avons écouté attentivement deux initiatives lors du séminaire des directeurs de Sarlat. La première est développée par un acteur privé. Gé Kusters, propriétaire d’un camping en Dordogne, développe les mobilités douces avec ses moyens en proposant une voiture électrique partagée aux clients de son camping. La seconde est portée par le SIBA (Syndicat Intercommunal du Bassin d’Arcachon). Il s’agit d’agir face à la densification des flux (touristiques et des habitants) en engageant tous les acteurs de la destination dans une politique mesurée de mobilités durables.

Un exemple chez un prestataire engagé

Le Camping « Le Paradis » propose l’autopartage – un service « plus » depuis juillet 2014. Cet établissement est depuis plusieurs années sensible au « développement durable » avec le recrutement d’un jardinier très « écolo » en 1982.

Pourquoi un véhicule électrique dans un camping ? Outre l’image environnementale, les faibles rejets et des coûts d’utilisation raisonnables, ce véhicule est un véritable nouveau service pour les clients du camping. En effet, selon Gé, une part de plus en plus importante de ses clients et notamment les urbains de grandes villes du nord de l’Europe ne disposent pas (plus) de véhicule au quotidien. Ils partent néanmoins en vacances en Dordogne.

Une voiture électrique pour tout faire

Ce véhicule a plusieurs utilités. Tout d’abord, il permet au personnel du camping d’aller chercher les touristes à la sortie de la gare. Ensuite, il permet à ces mêmes personnes de se déplacer durant leur séjour en louant ce véhicule. Pour Gé, les difficultés principales résident au niveau de l’assurance du véhicule. Le passage par la plateforme drivy.com pour faciliter le côté réglementaire s’est avéré le plus simple. Cela dit, ce service qui connait un large succès depuis 4 belles saisons estivales, provoque de nouvelles charges de travail dues à la complexité technique (paiement en ligne, ouverture de compte sur le site intermédiaire en amont…).

Porteur en termes d’image mais peu rentable directement, ce service permet néanmoins d’augmenter la durée des séjours selon Gé.

D’autres pistes sont en projet :

• scooters électriques ou véhicules plus funs
• « Campings de recharge« : développer avec la fédération de l’hôtellerie de Plein-Air un dispositif de bornes de recharges pour tous le monde (touristes mais aussi habitants). Environ une cinquantaine de campings en Dordogne ont accepté le projet.

Un projet sociétal qui se transforme en engagement pour le territoire

Le Bassin d’Arcachon travaille à la mise en scène des acteurs qui font vivre le bassin 365 jours par an en l’associant aux mobilités douces autour de quatre thèmes :

• Valoriser et accroitre la diversité économique
• Poursuivre l’action pour la préservation de l’environnement
• Développer le tourisme 4 saisons
• Impliquer les résidents dans la démarche

Une marque territoriale pour tout le monde

Le projet est global et repose autour de la stratégie de la marque territoriale partagée avec l’idée de comment associer « préserver et promouvoir » ? et comment tourisme et habitants, oeuvrent ensemble pour valoriser la diversité économique. Les enjeux de ce projet sont de trois ordres :

• Promouvoir les 4 saisons
• Mieux communiquer sur les déplacements doux et les transports en commun
• Partager une conscience environnementale commune

Le travail du SIBA cible d’une part la clientèle touristique avec la création par exemple d’un mobil first permettant le calcul d’itinéraire en vélo. Une carte des déplacements (à pied, à vélo, en bateau est accessible facilement) et une mise en avant de message incitatif inonde les supports de communication.

« Bassin malin : bateau + vélo » / « je fais ma B-A »

La création d’un outil intégré sur le site portail bassin-arcachon.com et le site web de la Dune du Pilat permet de voir l’état du stationnement en temps réel du parking de la Dune.

Le SIBA cible également les professionnels du tourisme en travers le recensement de l’offre avec la réalisation d’un support pour illustrer la démarche : le Bassin SANS ma voiture.

Afin que tout cela prenne vie, la cible habitant demeure essentielle. Le thème principal est « changeons nos habitudes… je fais ma B’A pour le Bassin en pratiquant le covoiturage, en prenant les transports en commun ou encore le vélo ! »

Ainsi tous ceux qui font vivre le bassin sont concernés et le SIBA les incite à s’engager pour devenir partenaire de la marque (contrat de licence signé). Dans la liste des propositions d’engagement, on retrouve  :

• « Je m’engage à valoriser l’utilisation des modes de déplacements doux (vélo …) toute action qui permet de désengorger les routes ! »
• « Je me mobilise durant la « semaine de la mobilité » en septembre pour être « exemplaire » en tant que partenaires B’A ! »
• Pour les acteurs du tourisme : « toujours indiquer à nos hôtes, à travers des conseils éclairés, que le territoire est petit mais que les temps à parcourir sont longs et qu’il existe des alternatives : transport en commun, navettes maritimes… »

Alors les mobilités douces, comment les développer ?

L’idée retenue lors de cet atelier est de travailler des partenariats public-privé pour faciliter l’inter-modalité et : 

1. Considérer l’habitant et le touriste au même titre pour une offre globale
2. Renforcer le lien entre acteurs touristique et acteurs des mobilités
3. Travailler des partenariats avec les acteurs privés existants (transport de bagages,…)

A court terme, voici ce que les structures offices de tourisme peuvent faire : recensement de l’offre existante (gares, services autour des gares…), penser au transport de bagages à travailler avec des opérateurs privés, agir sur la coordination des opérateurs existants, rencontrer les associations locales engagées…

Dans un temps plus long, les offices de tourisme peuvent engager des négociations avec la SNCF pour maintenir les rames équipées pour le transport de vélo (travailler sur l’adaptation des quais, …), anticiper l’implantation des locations de vélo dans les gares, rencontrer les collectivités pour éviter la multiplication les actions en sillon entre les différents services (urbanisme, transport, tourisme…).

Pour résumer

Près de la moitié des urbains sont prêts à se débarrasser de leur voiture de façon définitive, les français sont de plus en plus conscients de la nécessité de prendre en compte les impacts économiques, sociaux et environnementaux de leurs voyages, le tourisme durable devient un secteur structuré avec des critères et des engagements plus ou moins forts selon la certification recherchée, les acteurs privés inventent des solutions pour satisfaire leurs clientèles propres, les destinations s’engagent de plus en plus… Alors êtes-vous partant pour devenir le chef d’orchestre des initiatives locales ?

Pour aller plus loin